DVD A LA LOUPE

Résumé : L'inspecteur Chan se voit confier la protection d'une femme, petite amie d'un parrain de la mafia que Chan essaye de mettre sous les verrous depuis plusieurs mois. En moins de 48h, il va devoir faire face à cette mission, à sa fiancée qui le croit infidèle et à la horde de mafieux qui veut le mettre hors circuit.

Avis :  1985. Sort sur les écrans « Police Story », joué, réalisé et produit par Jackie Chan. Enorme succès dans son pays d’origine, il permet à son géniteur d’introduire le cinéma asiatique populaire dans nos contrées alors hermétiques à ce genre de film et plutôt axée sur le cinéma franchouillard ou les boursouflures américaines dans lesquelles le numérique commence à poindre. En Chine, il a déjà accumulé quelques succès avec « Drunken Master » où « le chinois se déchaîne » (tous deux édités chez HK Video) et s’est imposé comme le renouveau du film de Kung-Fu en introduisant dans ses combats un style qui n’appartient qu’à lui et donne une puissance comique inégalée comme en témoigne « Le marin des mers de Chine ». Avec « Police Story », c’est au polar qu’il s’attaque et construit alors son premier chef d’œuvre personnel le plus total en pulvérisant les codes du genre.

Le scénario de ce film n’est certes des plus recherchés et s’inscrit directement dans la lignée des films alors en vogue à cette époque type « L’arme fatale » ou « Dirty Harry » dans lesquels un flic tête brûlé se retrouve coincé entre gangsters qu’il doit arrêter et ses collègues loin d’approuver ses modes de fonctionnement Ce qui est plus original, c’est avant tout son traitement général. Un petit peu schizophrène, il fait penser à la série TV « City Hunter », intitulée chez nous « Nicky Larson ». En effet, alternant scènes comiques frisant la gaudriole et d’autres plus dramatiques, ce film fait bien plus penser au manga précité qu’à l’adaptation plus ou moins officielle mise en boîte 7 ans plus tard par Wong Jin avec le même Chan dans le rôle titre. On retrouve donc un (parfait) mélange entre scène humoristiques parfois cucul, porté sur les quiproquos, les insinuations sexuelles, le comique de situation, un peu comme un grand vaudeville moderne et débridé qui ne peut certes pas plaire à tout le monde (même si cet humour s’avère parfaitement exportable contrairement à nombre de films asiatiques) mais qui figure quand même comme ce qui s’est fait de mieux dans le genre, car bien joué par Jackie Chan et Maggie Cheung et parfaitement dosé
En parlant de chorégraphie, occupons nous un peu des combats qui sont alors à l’époque la quintessence du genre, rejoignant dans notre époque actuelle, post années 2000 le fulgurant « Ong Bak » que j’ai eu l’occasion de critiquer dans ces pages et qui s’avérait, tout en recréant un nouveau style, un formidable retour aux sources de l’art martial avec un grand A car dépareillé de tout artifices qui le décrédibilisait alors (câbles en 85, effets numériques en 2000)
Mais à l’instar du film thaïlandais, « P.S » n’intègre pas seulement des combats spectaculaires et particulièrement nerveux, notamment celui de la fin du métrage qui dure plus de 10 minutes. Il y a là aussi des cascades jamais vues dans le cinéma d’alors tant elles sont à couper le souffle et où la prise de risque semble être à son paroxysme. Imaginez un peu, trois voitures détruisant un bidonville perché sur les pentes d’une colline…c’est déjà pas mal. Superbement mise en scène, on a l’impression que la prise de vue a été unique et en multi caméra. Ces voitures, ne se contentent pas de ravager ce village, elles passent au milieu d’une foule de cascadeur qui se jettent au dernier moment de devant leur passage et je vous invite sérieusement à passer la scène au ralenti pour évaluer la portée du risque engagé.
Plus classique, le film se continue et se termine à la manière d’un polar HK mâtinée de scènes de kung-fu mais cette fin, se déroulant dans un centre commercial bondé a retenu l’attention des spectateurs depuis toutes ces années par la justesse de sa chorégraphie, la nervosité du montage loin d’être épileptique cependant et portée par un acteur alors au sommet de sa forme (olympique).

Alors certes, quelques esprits chagrins me reprocheront la note mise à un film au scénario certes futile mais si celui-ci est plutôt mince, il n’en démérite pas moins car le traitement du personnage principal est quand même (et c’est suffisamment rare dans ce genre de production pour être souligné) approfondi. D’abord superficiel voir guignolesque, le rôle de J.C s’épaissit peu à peu et sans égaler « Crime Story » (son film le plus sombre) qui préfigurait le récent « New Police Story », son côté obscur et vengeur apparaît un peu et amplifie l’intensité dramatique de la fin.
On notera enfin une bande originale très basique et fortement estampillée 80’s mais qui au final se révèle être entraînante et qui profite largement à l’aspect comique du film.

Vous l’aurez compris, « Police Story » est un film à (re)découvrir de toute urgence. Véritable fleuron des années 80 il est le plus pur mariage entre comédie martiale dans lequel a toujours excellé l’acteur Jackie Chan et polar noir comme a su pondre Hong-Kong et dont Johnnie To est le dernier grand représentant. Je vais maintenant m’atteler à la loupe du deuxième volet des aventures de l’inspecteur Chan, film que je n’ai pas vu depuis près de 20 ans.

 
Police story - Edition Seven7