DVD A LA LOUPE

Résumé :  Grâce aux efforts de Germain Cazeneuve, éducateur convaincu de sa mission, Gino sort de prison pour mener une vie honnête et droite. Mais l'inspecteur Goitreau, considérant tout ancien détenu comme un récidiviste, le harcèle au point de le pousser au meurtre...

Avis :  "2 Hommes dans la ville" est un drame sur la difficulté pour un ancien délinquant de reprendre une vie normale, doublé d'un pamphlet contre la peine de mort. Rassemblant à nouveau Gabin et Delon sous la direction de José Giovanni, quatre ans après "Le Clan des Siciliens", ce film très beau et empreint de tristesse pousse très loin l'étude des personnages et dissèque un engrenage fatal qui va broyer un homme poursuivi par le malheur. Inutile de préciser que ce film n'a rien d'un divertissement et n'est pas à conseiller si l'on veut se remonter le moral. Mais la justesse de son scénario, l'appropriation du personnage de Gino Strabliggi (Alain Delon) par les spectateurs, la profonde humanité qui ressort de la personnalité de Germain Cazeneuve (Jean Gabin), et le caractère implacable et borné de l'inspecteur Goitreau (Michel Bouquet) illustrent parfaitement un drame personnel comme malheureusement il en existe dans la réalité. L'histoire, très poignante, rappelle en de nombreux points celle des Misérables de Victor Hugo, avec un parallèle Jean Valjean/Gino et Javert/Goitreau qu'on ne peut pas ne pas remarquer, le ton général étant d'ailleurs aussi sombre et triste dans chacune des deux œuvres.

Gabin est parfait dans un rôle de protecteur, parfaitement en phase avec son physique à la fois bonhomme et un peu bourru. Personnage du film, il se positionne également en narrateur des évènements qui en constituent la trame. Quant à Alain Delon, il réussit l'une des meilleures prestations de sa carrière, mettant en exergue les différentes facettes d'un personnage à la fois dur et fragile. Il ne surjoue jamais, et fait passer l'émotion à travers des dialogues sobres, ponctués de regards et d'expressions particulièrement justes, avec des scènes terriblement marquantes comme la mort de sa jeune femme (Ilaria Ochini), suite à un accident de la route provoqué par des chauffards, ou comme les instants angoissants, et inoubliables, qui précèdent son exécution par la guillotine. Michel Bouquet réussit à rendre parfaitement détestable son personnage symbolisant la justice froide, aveugle et dénuée de toute humanité. Mimsy Farmer est émouvantes dans ses efforts pour ramener Gino à une vie normale, et on notera de manière anecdotique les débuts de Bernard Giraudeau, et ceux de Gérard Depardieu avant que "Les Valseuses" ne le révèlent au grand public.

Si le cinéma est souvent là pour divertir et s'éloigner du quotidien il existe également pour nous pousser à réfléchir sur des comportements de la société qui conduisent des gens à perdre pied, et d'autres à exercer une justice radicale. Même si les partisans d'une justice pure et dure auront beau jeu de souligner un scénario présentant le criminel comme le "gentil", et la victime comme le "méchant", il ne fait pas de doute que ce film a compté de manière déterminante parmi les actions qui allaient conduire, quelques années plus tard, à l'abolition, en France, de la peine de mort. La qualité technique globale du DVD rend justice à ce film formidable, mais on imagine facilement les bonus qui auraient pu l'accompagner, et il est dommage que l'éditeur se soit cantonné à des bandes annonce purement promotionnelles.

 
2 hommes dans la ville