DVD A LA LOUPE

Résumé :  Muni d'un appareil photo, un cinéaste promène son regard dans les villes de France et d'Italie. Devant ses yeux naissent quatre histoires d'amour, à Ferrare, Portofino, Aix en Provence et Paris. Quatre passions dont les femmes sont les héroïnes: la chronique d'un amour insaisissable, une jeune fille qui avoue un crime, des couples qui se déchirent, une religieuse tentée par l'amour qui s'interroge sur sa vocation. Par-delà les nuages, tombent les faux-semblants...

Avis : Dernier long métrage de Michelangelo Antonioni, réalisé en collaboration avec Wim Wenders, "Par-delà les nuages" est en fait composé de quatre historiettes, reliées entre elles par les pérégrinations d'un cinéaste en recherche d'idées, interprété par John Malkovich. Chaque séquence, tirée d'un recueil de nouvelles écrites par Antonioni lui-même, examine les relations amoureuses, éphémères et contrariées, d'un homme et d'une femme, et donne l'occasion de visiter un coin d'une ville d'Italie ou de France. Il s'agit d'un film d'auteur dont tout l'intérêt réside dans les attitudes des personnages, leurs silences (il y a relativement peu de dialogues) et l'esthétisme des images et de la musique. L'accueil du public a été assez mitigé à sa sortie, lors du festival de Venise 1995, soulignant, à juste titre, la lenteur du rythme et le côté décousu du scénario, car, à part la présence plus ou moins marquée du cinéaste, il n'y a aucun lien entre les différentes séquences. Ce film poétique véhicule néanmoins une ambiance assez envoûtante, un brin mystérieuse, très fortement teintée d'érotisme, et possède un charme certain capable d'enchanter ceux qui se laisseront doucement porter au-delà des… nuages…

La première séquence met en scène deux jeunes gens, Silvano (Kim Rossi-Stuart) et Carmen (Inès Sastre) qui vont passer leur temps à se chercher et s'attendre, sans savoir concrétiser un amour durable. Puis le cinéaste rencontre une jeune fille mystérieuse qui lui avoue avoir tué son père de douze coups de couteau, précisant qu'ensuite elle fut acquittée, sans vouloir révéler le mobile du meurtre. Ils se retrouvent ensemble dans une chambre avant de repartir chacun de leur côté. La troisième séquence montre un couple en crise (joué par Peter Weller et Fanny Ardant), ainsi que la maîtresse du mari (Chiara Caselli) et l'amant de la femme (Jean Reno). Enfin Niccolo (Vincent Perez), va tenter de séduire une jeune femme qui se destine à la religion (Irène Jacob). Ces séquences ont été tournées en fin d'automne par Antonioni , et elles sont empreintes de mélancolie, la froideur de la pluie contrastant avec le thème centré sur les personnages féminins, leur douceur et leurs désirs, chacune de ces rencontres se terminant néanmoins par une séparation. Les transitions, où le personnage joué par Malkovich nous fait part de ses réflexions philosophiques, ont été quant à elles tournées par Wim Wenders, et l'on ressent d'ailleurs nettement la différence de style. La communication entre les personnages et les spectateurs se fait essentiellement par l'image, car il y a peu de dialogues, le réalisateur disséquant les attitudes par des gros plans, des expressions du visage, des regards accompagnés de longs silences. La beauté féminine est largement dévoilée à travers les charmes dénudés d'Inès Sastre, Chiara Caselli, et surtout Sophie Marceau qui se livre en outre devant la caméra à ses ébats amoureux passionnés avec Malkovich. Les vues extérieures font également l'objet d'une grande recherche, la dominante étant la tonalité grise d'un temps pluvieux avec quelques séquences sous un beau soleil d'hiver comme la scène où l'on voit un artiste peintre (Marcello Mastroianni) deviser avec une promeneuse (Jeanne Moreau) en couchant sur la toile les paysages de Provence.

Antonioni avait quatre-vingt deux ans lorsqu'il tourna "Par delà les nuages", et il avait souffert auparavant d'une attaque cérébrale qui l'avait laissé partiellement paralysé. Son travail n'en est que plus remarquable, cette œuvre rassemblant toutes les qualités, et tous les défauts, de ce metteur en scène scénariste au style si particulier, et ce film est en conséquence est à réserver plutôt à ses admirateurs ou à ceux qui souhaiteraient le découvrir.

 
Par-delà les nuages