Avec "Le masque de la mort rouge", le réalisateur/ producteur Roger Corman nous offre une somptueuse ( mais assez libre ) adaptation d'Edgar Allan Poe.
Le script nous présente un seigneur médiéval, satanique et cruel ( dès la première séquence, avec le dilemme offert à la jeune paysanne ), organisant un gigantesque fête dans son chateau ( dont le bal masqué final ), alors que la "mort rouge", symbolisant la peste, frappe au dehors.
Et si le métrage multiplie les sous-intrigues ( l'attirance du seigneur pour la jeune Francesca, le nain...), brouillant quelque peu la limpidité de l'ensemble, Roger Corman propose surtout à son spectateur une visite guidée par le majestueux Vincent Price dans un univers de dépravation, de sadisme et de cruauté raffinée, tout en apportant une évidente critique de cette classe bourgeoise pervertie et complètement amorale, tout en imposant une vision sataniste puissante, dictée par les répliques assassines de son personnage principal.
Mais si le rythme du film est plutôt lent, composé d'un bon nombre de scènes de dialogues heureusement intéressantes et grandiloquentes, il parvient sans mal à se montrer prenant de bout en bout, porté par un esthétisme flamboyant, hésitant entre extravagance et des décors gothiques hérités de la "Hammer" ( la visite des sous-sols du chateau, avec ces cachots habités par des suppliciés ), tout en jouant de manière extraordinaire sur les couleurs vives ( toujours dans les décors, avec des pièces aux peintures surprenantes ) et en nous réservant quelques séquences fortes ( l'attaque du corbeau ) appropriées, même si on pourra reprocher au film d'utiliser une symbolique facile ( le personnage drapé de rouge ) et basique dans sa représentation du culte sataniste.
L'interprétation est juste, dominée par un Vincent Price formidable, loin de tout cabotinage, qui apporte à son personnage une aura essentielle à la cohérence du métrage, tout en se ménageant quelques touches d'un humour subtil, mais bien évidemment noir et cruel. La mise en scène de Roger Corman est fluide mais peut-être trop statique.
Donc, "Le masque de la mort rouge" reste un petit classique oublié du fantastique des années soixante, qui mérite largement d'être redécouvert !
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