Quand Bertolucci a annoncé la mise en chantier de ce film mettant en scène un trio amoureux sur fond historique de mai 68, tout le monde s'attendait à retrouver un dernier tango à Paris et toute la chaleur qui se dégageait de ce chef d'oeuvre. D'un côté c'est normal d'attendre beaucoup d'un réalisateur de ce niveau qui a livré au 7ème art nombre d'oeuvres essentielles, souvent controversées mais toujours passionnantes (le dernier tango à Paris donc, mais aussi le dernier empereur, un thé au sahara ou encore l'ambitieux 1900) mais pour the dreamers, le buzz apparu autour de ce film en a fait un objet controversé avant sa sortie (c'est la mode...) et les spectateurs ont donc forcément été déçus.
Car s'il y a bien un immense réalisateur derrière the dreamers ce n'est pourtant pas un "grand" film mais plutôt une légère récréation, ou plutôt une suite logique dans l'oeuvre du metteur en scène qui semble après beauté volée et shanduraï avoir beaucoup moins d'ambition qu'avant.
Et si on prend ce film pour ce qu'il est, à savoir un petit film de grand cinéaste, on l'apprécie à sa juste valeur. Il ne faut pas non plus s'attendre à du Larry Clark, même si les affiches et jaquettes racoleuses à souhait le laissent penser. D'ailleurs le thème principal du film n'est pas le sexe chez les jeunes. Il s'agit plutôt du cinéma, ou plus encore de la cinéphilie. D'ailleurs le film s'ouvre sur les évènements scandaleux de la cinémathèque française en 68, par la suite les protagonistes font souvent référence à des films , classiques ou pas, lors de leurs jeux. Le métrage en lui-même est parsemé d'extraits de films, montés en parallèle à plusieurs scènes, accentuant l'effet de détachement de la réalité du trio.
Ensuite c'est sur qu'il est question de sexualité dans ce film, de sa découverte, de sa révolution même. En cela le film est très maîtrisé car l'alternance entre les scènes d'émeutes de 68 et l'intérieur de cet appartement parisien montrent bien qu'une vraie révolution a eu lieu cette année-là, culturelle mais aussi sexuelle. Et ces scènes d'intimité sont passionnantes, d'une poésie et d'un lyrisme fantastique, Bertolucci filme des adolescents comme peu de réalisateurs l'ont fait, avec crudité certes mais sans être voyeur, plutôt avec amour et nostalgie.
Au niveau de l'interprétation Michael Pitt est comme souvent impeccable en garçon américain presque androgyne, Louis Garrel beaucoup plus sobre que lors de ses apparitions télés et Eva Green tout simplement fascinante, alternant glamour et provocation, elle est superbe!
Pa sun grand film donc mais une belle évocation d'une époque importante, d'une révolution qui nous a mené là où nous sommes aujourd'hui. Une oeuvre pas essentielle mais intéressante, en plus signée par un réalisateur légendaire.
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