Entre "Clean, shaven" et "Keane" Lodge Kerrigan nous gratifiait de "Claire Dolan". Claire Dolan, call-girl d'une trentaine d'années qui vient de perdre sa mère, transite d'un appartement à l'autre, d'un homme à l'autre. Avec une rigueur sans faille, le film est tout entier resserré sur l'héroïne dont on suit le parcours sans jamais le quitter. La jeune femme est le coeur de cet univers deshumanisé et déserté par toute espèce de chaleur humaine. Menant sa succession de passes comme des expérimentations cliniques, elle est le mystère glacé autour duquel tourne ce film. Insaisissable parce qu'emportée dans une fuite en avant, elle est aux antipodes de l'imagerie habituelle du monde de la prostitution. Pas de position morale ni de voyeurisme ou de fascination pour une représentation du monde des call-girls. L'un de ses clients, qui la console du sentiment de honte qu'il suppose qu'elle éprouve, apparaît bien pitoyable face à cette femme qui fait de l'acte de vendre son corps autre chose qu'un moyen de survivre. Il se dégage de Claire Dolan une sensualité sèche d'une opacité inquiétante et troublante.
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