Pour son premier long métrage, Kim Chapiron, issu du collectif "Kourtrajmé", nous livre avec "Sheitan" une oeuvre assez radicale, alliant agréablement la farce à une violence graphique complètement assumée.
Le script met en scène quelques jeunes typiques issus des banlieues, qui après s'être fait jetés d'une boîte de nuit, suivent une jeune femme rencontrée sur place dans la maison de campagne de ses parents et y feront la connaissance du mystérieux et folklorique Joseph, le gardien des lieux.
D'entrée, le réalisateur annonce la couleur en optant pour un ton et un style très visuel, plein d'effets, pour nous présenter ses personnages principaux, de jeunes loosers de banlieue flirtant dangereusement avec la caricature ( mais on sent bien que cela reste entièrement volontaire ) qui pourront au choix faire sourire ou énerver quelque peu le spectateur ( le vocabulaire employé ) selon l'affinité de celui-ci avec ce milieu.
Mais ce sera véritablement avec l'entrée en scène de Vincent Cassel dans un rôle haut en couleur que le métrage prendra vraiment son envol, se focalisant en grande partie sur ce personnage bourru, bon enfant mais en même temps très cru et brutal, certainement légèrement demeuré, mais dont quelques détails, tant dans son attitude que dans ses paroles, sont les signes avant-coureurs du cauchemar à venir. Mais avant cela, l'intrigue s'emploie largement à confronter ses différents protagonistes issus de milieux entièrement différents, sans que l'on sache vraiment jusqu'à quel point l'auteur ironise dans sa description des campagnards.
Toujours est-il que le spectacle proposé restera terriblement jubilatoire, avec des séquences franchement comiques ( la baignade ), mais laissant régulièrement surgir de manière inattendue une tension crispée parfaitement maîtrisée, accompagné d'une violence froide, jusqu'à ce que le métrage ne choisisse définitivement son orientation , pour nous offrir une dernière partie complètement hallucinée, d'une brutalité réaliste et glaciale, mais qui n'omettra pas non plus d'ajouter une bonne dose de délire à son propos, sans oublier un léger suspense issu de plusieurs situations tendues ( la baignoire ) peu originales, mais toujours efficaces.
Et bien sûr, un certain humour basé en majeure partie sur les répliques des différents protagonistes et les aléas de la rencontre de ces deux mondes bien différents viendra ponctuer l'ensemble de manière souriante, mais plutôt répétitive, tout en incluant quelques clins d'oeil savoureux ( les prénoms ).
Enfin, l'auteur utilise admirablement ses décors, parvenant facilement à rendre inquiétante une maison d'apparence anodine et arrive à surprendre grâce à quelques effets savamment distillés tout au long du métrage.
L'interprétation est convaincante, quasiment entièrement portée par un excellent Vincent Cassel cabotinant à mort dans un rôle extrêmement jouissif, faisant ainsi presque oublier l'amateurisme des autres interprètes et la mise en scène du réalisateur est très vive, même si elle utilise parfois trop d'effets stylisés.
Donc, ce "Sheitan" s'avère être très plaisant à suivre, si on met de côté l'aspect très orienté de ses personnages et offre un déferlement de violence final qui dénote fortement dans notre production cinématographique hexagonale !
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