Après son brillant et injustement méconnu "Ugly", le réalisateur néo-zélandais Scott Reynolds continue sur sa lancée en nous livrant ce tout aussi remarquable "Heaven", tant sur le fond que sur la forme.
Le script suit le parcours d'un homme, joueur pathologique aux cartes, partagé entre son ex-femme et son fils et sa passion du jeu, mais les choses vont se compliquer quand il va faire la connaissance d'une transsexuelle médium qui va lire son avenir guère brillant.
D'entrée, le métrage nous invite à découvrir l'univers de son personnage principal, une sorte d'architecte sans le sou passant le plus clair de son temps à se disputer avec son ancienne compagne et mère de son fils et à suivre son ami tenancier d'une boîte à strip-tease dans des parties de cartes, alors qu'il va rapidement faire la connaissance de Heaven, une transsexuelle dont l'autre particularité, en plus de danser dans ce club servant également de salle de jeu ( notamment de poker ), est de voir l'avenir par flashes tel qu'il va inéluctablement se produire.
Après avoir secouru cette personne ambiguë lors de son agression par deux voyous, le personne principal va se lier d'amitié avec "elle", dont les visions morbides ne semblent guère augurer d'un avenir reluisant, et tandis que son divorce va prendre une tournure douloureuse.
Ce sera en mêlant de manière parfaitement limpide ses différents éléments que le métrage va mener de front plusieurs sous-intrigues qui bien entendu finiront par s'imbriquer lors d'un dernier acte certes explicatif, mais qui surtout aura le pouvoir de décontenancer et de dérouter le spectateur, tout en respectant une certaine morale.
Mais avant cela, l'intrigue aura pris le soin de s'intéresser largement à ses personnages pour les entraîner dans des rebondissements multiples et régulièrement porteurs de coups de théâtre impossibles à anticiper nous dévoilant le vrai visage de certains seconds rôles à l'apparence anodine.
Le réalisateur, en nous proposant justement une galerie de protagonistes fouillés et crédibles jusque dans leur bassesse, parviendra quasiment instantanément à rendre son "héros" attachant et parfois même bouleversant dans ses relations affectueuses avec son jeune fils dont il est privé par une épouse équivoque quant à ses sentiments envers son ancien mari, et ce malgré leurs disputes verbales amères.
Et si l'intrigue s'orientera peu à peu à recoller pour nous les différentes parties du puzzle des flashes vus par cette transsexuelle, tout en réservant bien des surprises, ce sera par le biais d'événements mélangeant parfaitement les genres et en affichant parfois une violence brutale et crue, qui explosera lors d'une seconde moitié du film parfois très graphique.
Mais Scott Reynolds, en plus de pouvoir s'appuyer sur son script "à tiroirs" où chaque personnage jouera un rôle bien défini mais impossible à cerner, saura admirablement utiliser la forme pour désorienter son spectateur et se servir d'artifices originaux et épatants dans la mise en scène de son histoire, tout en nous livrant quelques plans incroyables ( l'accident en plan-séquence est à ce titre définitivement bluffant et inoubliable, en plus de surprendre ) et stupéfiants.
L'interprétation est convaincante dans son ensemble et les quelques effets spéciaux sanglants du métrage restent réalistes et volontaires, mais sans s'imposer comme une priorité pour le réalisateur, et ce malgré l'utilisation d'une violence sèche et rude.
Donc, ce "Heaven" mérite absolument d'être découvert et laissera des traces dans la mémoire de son spectateur !
|