Pour son dernier film consacré au écrits d'Edgar Allan Poe pour le compte de la firme A.I.P., le réalisateur Roger Corman réutilise avec brio des éléments déjà présents dans les films antérieurs, de manière référentielle, pour nous livrer une intrigue assez fidèle à l'oeuvre littéraire d'origine, tout en étant une fois encore grandement marquée par la prestation hallucinée de Vincent Price.
Le script suit la romance entre une jeune femme et un homme, profondément marqué par son ancienne épouse décédée, au point de ne pas la croire morte et d'en être obsédé, et donc, l'arrivée de cette nouvelle présence féminine va déclencher une série d'événements étranges.
Après une courte séquence d'introduction nous montrant l'enterrement de cette Ligeia, dans une ancienne abbaye en ruines, jugé blasphématoire par un curé présent vite repoussé par son mari, Verden Fell.
Ensuite, l'intrigue reviendra sur les lieux où une demoiselle, Rowena, participant à une chasse à cour s'y égarera pour faire la connaissance de Verden, nous permettant ainsi de faire plus ample connaissance avec ce personnage torturé, mal à l'aise à cause d'un handicap l'obligeant à porter des lunettes noires pour se masquer d'une lumière trop vive pour ses yeux fragiles, et surtout hanté par son épouse, au point de croire voir en elle Rowena.
La première partie du métrage s'attachera à nous conter la bluette naissante entre ces deux protagonistes jusqu'à leur mariage, déjà pimenté par quelques faits troublants mettant notamment en scène un chat noir ne semblant pas du tout apprécier la nouvelle venue.
Mais ce sera véritablement dans sa seconde moitié et plus précisément lors de son final que le film prendra de l'envergure, tout en se limitant en partie à des thèmes communs et très classiques( dont une séance d'hypnotisme assez gratuite ) pour continuer d'afficher les tourments du personnage principal, alors que les séquences essayant de se montrer effrayantes ou inquiétantes auront quand même un peu de mal à remplir complètement leur rôle ( les apparitions surprises du chat noir ), malgré un esthétisme probant ( le cauchemar de Rowena ) et ce jusqu'à la révélation finale remarquablement amenée et plus que percutante débouchant sur une issue fataliste et macabre, au fort relent de nécrophilie ( tout en sous-entendu, bien sûr ! ).
Comme dans les films précédents de ce cycle, nous retrouverons une ambiance gothique ici par contre bien plus poussiéreuse et dégradée ( symbolisée par l'abbaye en ruines proche de la demeure de Verden Fell ), reflétant bien l'état d'esprit chaotique du personnage, lui aussi souvent visité par Roger Corman, alors que les méandres de la maison, tout en couloirs et passages secrets donneront un charme certain à l'ensemble.
Mais ce qui fera une fois encore en grande partie la réussite du métrage, ce sera l'interprétation bien naturellement dominée par un Vincent Price excellent, parfait dans le rôle principal, dont les tourments exploseront lors d'un final terriblement ingénieux et mettant en lumière les malheurs effroyables endurés par ce personnage.
La mise en scène de Roger Corman est également remarquable, tout en mouvement de caméra vif, alors qu'il aura recours à ses effets habituels pour rendre certaines séquences vaporeuses et fantasmagoriques, tout en n'hésitant pas à avoir recours sporadiquement à un humour discret mais souriant et en alignant des éléments se référant directement à ses films antérieurs.
Donc, cette "Tombe de ligeia" clôturera de manière plutôt efficace et convaincante les adaptations de Roger Corman dédiées à Edgar Allan Poe, malgré un certain classicisme vite balayé par l'efficacité de l'ensemble !
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