Réalisé en 1967 par l’immense cinéaste français Robert Bresson, auteur des géniaux Le journal d'un curé de campagne ou L'argent, juste après son formidable Au hasard Balthazar, Mouchette en reprend la même thématique, à savoir la recherche de la grâce et de la sainteté dans un monde injuste et inégalitaire, pour Mouchette, et de nouveau, le cinéaste en fait un chef d'oeuvre.
Adapté d'un roman de Bernanos, Mouchette est un modèle d'épure typique du cinéma exigeant de Bresson. Le film suit la destin d'une fille perdue prénommée Mouchette qui fait l'expérience de la cruauté du monde. Mouchette n'a rien : sa mère se meurt dans d'atroces souffrances, un père alcoolique, elle-même est constamment marginalisée, humiliée, battue, victime de la bêtise humaine et s'enlise au fur et à mesure dans le mal du monde. L'innocence n'a plus cours dans un monde hideux, déformé par la haine et la nature humaine, l'enfance est constamment bafouée et Mouchette n'a que la mort comme échappatoire, dans une scène finale magistrale, où la fille semble jouer puis roule, roule et se noie, dans l'indifférence générale. Au son de la superbe musique de Claudio Monteverdi, le destin à la dérive de Mouchette est tout tracé, inéluctable. Le spectateur suit son cheminement, de ses errements à sa mort, impuissant, tétanisé.
Sombre et sans issue, Mouchette est aussi pessimiste que pouvait l'être Au hasard Balthazar. Le suicide de la fillette devient alors un appel à l'aide, tout en plaidant en faveur de toutes les victimes. La mise en scène de Bresson s'attache à l'essentiel et garde tout le long du métrage une rigueur implacable.
A part dans le cinéma français et même mondial, Bresson est un cinéaste essentiel, obsessionnel, qui ne doit rien à personne et dont chaque oeuvre est empreinte d'absolu. Mouchette est l'un de ses chefs d'oeuvre (mais Bresson n'a fait que des chefs d'oeuvre) et est le complément indispensable à Au hasard Balthazar.
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