CRITIQUE DVD

Somptueux décors désertiques et sculpturaux, quiétude solennelle à peine troublée par le calme vent des hauteurs ; le cadre pictural de la première partie de ce troisième film d’Emanuele Crialese est mémorable. Il installe d’emblée l’onirisme planant qui va caractériser Golden Door de la première à la dernière seconde, faux film historique en costumes plumés roses fuchsia, mais vrai drame bizarre et surréaliste, dont la vision dépasse de très loin les différents points de vue scolaires et plus qu’académiques qui ont jusqu’ici jalonné la portée à l’écran de cette tragique migration de 1900 vers le nouveau monde. Le cinéaste, plein de compassion pour ces paysans qu’il filme comme des esprits perdus en plein océan à qui on demande l’impossible, évite ici toute banalité en faisant constamment naviguer son récit entre rêve et réalité ; le cadre historique de cette dualité, moment important de l’histoire, n’était pourtant à première vue pas le théâtre idéal pour ce genre de divagations scénaristiques hallucinatoires. D’où un étonnement constant, voire grandissant, au vu des différents flashes fantasmés qui surgissent de l’esprit des protagonistes tout au long du récit, et qui, en plus d’offrir des plans et des allégories à la lisière de la poésie, allègent considérablement un récit qui ne demandait qu’à être traité de la sorte, sans empathie aucune, ni déclamation facile. A la cérémonie habituelle, Crialese préfère un lyrisme très tempéré qui surgit dans les moments les plus inattendus, qui confère élégance et modernisme à un film qu’on attendait pourtant définitivement embourbé dans ses conventions. Il démontre également d’une main de maître qu’il est un pur créateur d’ambiances, qu’il filme en plein cœur de l’hallucinante campagne sicilienne déjà mentionnée, ou bien qu’il s’aventure dans une effrayante scène de chaos, dangereuse fureur en plein cœur de la contemplation, qui secoue un voyage en bateau dont tout le monde ne sortira pas indemne. Les comédiens, tous impeccables et attachants, dont l’étonnante et décidément insaisissable Charlotte Gainsbourg, confèrent à cette tragédie onirique une grâce et une inspiration qui achèvent d’en faire un grand film, sublime, imprévu et envoûtant.

Le film, visuellement splendide, bénéficie d'un cinémascope à la rigueur et à l'étalonnage tout aussi remarquables. Une oeuvre d'art plastiquement magnifique, présentée dans un écrin somme toute bien précieux.

Pistes sonores assez basiques, qui souffrent par endroits d'imperfections notables, proches du blanc par endroit (!).

Interactivité très basique. Les menus (faiblement) animés ne font preuve d'aucune originalité notable, tandis qu'en guise de bonus, l'éditeur (peu connu il faut dire pour ses frasques dans ce domaine) ne s'est pas déchaîné.

On se retrouve donc avec un très bon making-of (26'), qui reste trop maigre au regard de l'oeuvre qu'il accompagne, une galerie peu fournie d'affiches cinéma non retenues, ainsi que la bande-annonce du film (2'), présentée en VF et VOST.

Un disque joliment sérigraphié trône au coeur d'un digipack à deux volets non moins séduisant, bien que faisant preuve, comme à l'habitude de l'éditeur, de carences graphiques notables. Encarts grossiers, polices énormes, effets cheap... Il n'empêche, avec sa belle affiche cinéma et le fourreau qui l'encarte, ce petit coffret a de la gueule.

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