Woody Allen continue son périple Londonien avec des personnages simples qui sont confrontés à des situations délicates en essayant de vivre avec ou de les surpasser. Après le splendide Match Point et un Scoop fort sympathique sans être pour le moins transcendant, l'intellectuel new-yorkais revient avec un drame noir fort enthousiaste qui le propulse au sommet de son art.
Malgré son grand âge et un film par an, ce qui laisse parfois craindre des déceptions, Allen continue à nous surprendre, dans le sens positif du terme. Dès le début, le spectateur n'a pas l'impression de se trouver face à un thriller à la dramaturgie très dense tant cela commence comme une comédie quelconque. Deux frères et leurs compagnes respectives sont sur un petit bateau en train de raconter des blagues. Mais derrière les visages des deux frangins qui ne se comprennent plus et ne savent plus s'expliquer, se cache une douleur que l'on trouve tout au long du film : douleur d'un jeune mécanicien alcoolique suite à une grosse perte d'argent en jouant au poker, douleur d'un restaurateur, neveu d'un riche homme d'affaires qui tombe amoureux d'une actrice obsédée sexuelle et qui ne rêve que d'argent et de pouvoir.
Il est évident que l'univers dépeint ici par Woody Allen (après la bourgeoisie dans Match Point et le monde de la magie dans Scoop) n'est pas tout rose mais il lui reste néanmoins un peu d'humanité.
Le film de Woody Allen prend trois directions strictement différentes. La première est celle de la comédie gnangan et du film d'amour à deux balles avant de virer au suspense pur et dur, nous clouant littéralement dans notre fauteuil. En effet, Allen filme avec maestria et angoisse l'hésitation du meurtre, jusqu'à son aboutissement, livrant des scènes de tension absolument remarquables (l'exécution du crime ou encore les deux frères se cachant derrière les murs, prêts à sauter sur leurs proies), avec la peur au ventre et laissant toute sympathie envers les personnages de côté.
Enfin, l'oeuvre du cinéaste se transforme en drame tragique, comme un refus de terminer le film avec une fin heureuse et moralisatrice pour faire place à une séquence brutale qui ne peut laisser personne indifférente. Basculant dans une histoire fratricide à faire froid dans le dos, Cassandra's Dream est surtout l'occasion d'offrir à Ewan McGregor et Colin Farrell ce qui sera, dans le futur, un de leurs meilleurs rôles de leur carrière.
Woody Allen nous donne une nouvelle claque cinématographique, racontant une hisoitre sombre avec la sobriété et l'humanité digne d'autres grands cinéastes.
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