Malgré son statut de "blockbuster", ce "Je suis une légende" ne sera pas le film bourré d'action attendu pour au contraire bien retranscrire l'esprit même du roman de Richard Matheson dont il est une adaptation libre mais en même temps fidèle, tout en comportant quand même quelques morceaux de bravoure édifiants.
Le script va laisser un virus dévastateur détruire la population humaine en ne laissant en apparence qu'un seul survivant, un virologue tentant encore et toujours de créer un vaccin tout en devant se préserver d'humanoïdes mutants assoiffés de sang.
Après un court prologue ne nous montrant d'une scientifique déclarant sur un plateau de télévision qu'elle a réussi à vaincre le cancer, le métrage va tout de suite mettre son personnage principal en situation, nous laissant de la sorte découvrir la ville de New-York dévastée, silencieuse et vide de ses habitants, que va arpenter en voiture Robert Neville et son berger allemand, traquant des biches avant de retourner se barricader avant la tombée de la nuit chez lui dans sa maison transformée en forteresse inviolable pour y travailler dans son laboratoire en sous-sol.
L'entame du film sera bien entendu impressionnante avec ces rues désertes, envahies par la végétation, tandis que des véhicules abandonnés joncheront la chaussée, nous réservant même quelques rencontres inattendues avec ces biches courant partout en troupeau et paraissant complètement déplacées dans cet univers humain, le tout dans un silence de mort. La présentation du personnage central sera ainsi progressivement, nous faisant découvrir lors de courts flash-backs judicieux et parsemés tout au long du film l'origine du virus, pour surtout nous permettre de s'immiscer dans le quotidien bien réglé de cet homme esseulé, conversant avec son chien et s'inventant des situations de la vie courante pour tenter de ne pas sombrer dans la folie, comme lorsqu'il parlera à ces mannequins disposés par ses soins dans une médiathèque, mettant de la sorte parfaitement en avant sa solitude extrême et sa volonté de ne pas sombrer dans la folie en gardant un semblant de vie sociale, puisqu'il regardera par exemple également des journaux télévisés enregistrés, comme s'il s'agissait de nouvelles fraîches.
Cette description occupera presque entièrement la première partie du film, tout en mettant Neville en présence de ces créatures anciennement humaines qui peupleront la nuit et les recoins sombres pour des rencontres offrant au métrage ses séquences d'action régulières mais sans paraître pour autant gratuites pour au contraire continuer de rendre la moindre manie de Neville judicieuse et mûrement réfléchie pour ne pas subir les assauts des monstres.
En renouvelant souvent ses situations évolutives, l'intrigue n'ennuiera jamais son spectateur grâce à un rythme constant et un apport permanent d'informations intéressantes aussi bien sur le mode de vie de Neville que sur le virus ou ces créatures, attendant ainsi un rebondissement important pour basculer dans une dernière partie certes plus musclée (l'attaque des monstres contre la demeure de Neville) et virulente, mais également légèrement moins judicieuse dans certains choix narratifs, et ce même si le final apportera son lot d'espoir tout en surprenant quand même quelque peu par un événement surprenant.
Le réalisateur pourra compter sur des décors époustouflants pour installer un climat sinistre et laissant planer un danger omniprésent avec ces monstres cachés dans la pénombre qui sembleront guetter Neville à chaque instant, nous révélant au détour d'une séquence que le moindre faux pas peut être fatal avant de nous faire comprendre plus tard que les créatures malgré leur condition quasi animale sont dotés d'intelligence et de perspicacité, ce qui nous offrira en deux temps les situations les plus graphiques du métrage.
Mais ce sera surtout la phase d'installation de l'intrigue qui surprendra le plus en évitant tout stéréotype inhérent aux "blockbusters" pour au contraire paraître presque intimiste dans sa façon de suivre Neville dans ses déplacements aussi bien à l'extérieur que chez lui, nous laissant bien évidemment s'attacher à cet homme complètement seul et cherchant par tous les moyens à ne pas perdre pied avec la réalité.
Le métrage pourra également compter sur l'interprétation remarquable d'un Will Smith débarrassé de ses tics habituels pour ici paraître définitivement crédible et faisant parfaitement passer ses émotions et sentiments, tandis que la mise scène du réalisateur sera efficace mais sans forcer le ton ou chercher à surexposer les situations. Par contre, les effets spéciaux sont mitigés, l'animation des mutants restant trop visible et contrastera avec ces décors absolument convaincants et réalistes.
Donc, ce "Je suis une légende" s'avérera être une bonne surprise dans son contexte de "blockbuster" et parviendra à impliquer son spectateur au-delà des espérances premières !
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