Bien que souvent rattaché au "giallo", ce "L'homme sans mémoire" n'en sera pas vraiment un avec son intrigue tenant bien plus du thriller, mais sa machination plus que complexe dévoilée peu à peu et le style de mise en scène l'en rapprochera quand même en partie, ce qui n'empêchera pas le métrage d'être largement prenant en titillant constamment son spectateur aussi perdu que le personnage principal pour essayer de démêler une sombre affaire venue du passé.
Le script va laisser un homme amnésique après un accident de voiture tenter de se remémorer son passé, chose qui deviendra urgente quand un individu se disant un de ses anciens amis va le menacer en se disant avoir été doublé.
D'entrée le métrage va avancer son personnage principal, Edward mais surnommé Ted, se rendant chez son psychanalyste avec lequel il essaye de retrouver sa mémoire perdue, se retrouvant ainsi sans famille ni ami. Mais pour cette séance, il aura été suivi par un certain Philip qui se dira être un de ses amis. Ted va l'emmener chez lui et tout de suite cet homme va montrer sa violence et menacer Ted s'il ne lui rend pas ce qui lui appartiendrait.
Devant l'ignorance et l'incompréhension de Ted, l'homme va se faire de plus en plus menaçant et alors qu'il s'apprêtera à tuer Ted, ce sera lui qui sera tué par un mystérieux tireur embusqué. Peu après, un télégramme va arriver pour annoncer qu'une certaine Sara l'attend le vendredi suivant dans une gare.
Cette entame du métrage lancera instantanément un suspense au travers des quelques petits éléments avancés très rapidement, présageant un passé trouble pour ce Ted dont ce Philip ne voudra pas croire à son amnésie, faisant pour le coup douter également le spectateur malgré une apparente sincérité de ce Ted ne comprenant rien de ce qui lui arrive. Cela ne l'empêchera pas de cacher le corps sans vie de Philip.
L'intrigue va alors nous présenter cette Sara, officiant dans une piscine en tant que maître-nageur et flirtant plus ou moins avec Daniel, un médecin s'occupant aussi de la piscine, alors qu'ils sont tout le temps accompagnés par un petit voisin de Sara. Cette jeune femme en apparence tout à fait normale et sans histoire connaîtra quand même des petits soucis avec un visiteur nocturne, pour une séquence bien angoissante héritée elle fortement du "giallo".
Et un peu plus tard, elle va également recevoir un télégramme de Ted, que nous découvrirons être son mari disparu depuis huit mois, lui annonçant qu'il arrivera dans sa ville le même vendredi.
Les retrouvailles se feront sur un mode attentif et aidées par un inconnu qui dira à Ted où se trouve son épouse, lançant alors véritablement l'intrigue puisque ce sera dans cette ville que les choses vont être peu à peu tirées au clair, progressivement grâce à des indices extérieurs, mais également grâce à Ted pour qui la mémoire va revenir par bribes.
L'intrigue globale prendra donc la forme d'un puzzle (ce qui sera d'ailleurs un des titres alternatifs du film) lentement recréé par Ted et son épouse qui se retrouvera malgré elle mêlée à toutes une série d'intimidations plus ou moins malsaines (le chien) et cherchant à effrayer le couple nouvellement reformé, tandis que cet individu aiguillant Ted dans sa quête de souvenirs se montrera de plus en plus pressant pour obtenir certaines informations de Ted, ainsi que pour se voir restituer une certaine marchandise que Ted aurait dissimulé pour tenter de le doubler.
Le métrage parviendra facilement à impliquer son spectateur qui sera constamment sur le qui-vive pour essayer de rassembler les données délivrées pour comprendre le mécanisme de la machination dans laquelle ce Ted va se retrouver en position de victime alors qu'apparemment par le passé il était bien différent et pas forcément en bien, mais ce sera véritablement dans un dernier acte diabolique que tout va se mettre en place pour une série de situations et surtout de révélations bien senties et pas franchement prévisibles mais en tout cas brillantes et originales, venant apporter les réponses aux questions tout en nous gratifiant d'un final mémorable, bien méchant et quelque peu sanglant, avec même un plan qui annoncera ouvertement le "Pulsions" de Brian De Palma.
L'intrigue sera orchestrée par des protagonistes bien travaillés, intrigants ou arrivant même à devenir attachants, aussi bien ce Ted qui sera ravi de se découvrir une femme aussi ravissante et qu'il tentera de reconquérir mais dont la dualité du côté obscur refera surface par moments, que sa compagne partagée lors du retour de son mari mais retrouvant rapidement des sentiments pour lui, tandis que cet individu passant son temps à se moucher même s'il ne semblera pas bien dangereux au premier abord se révélera capable d'une cruauté réelle (les allumettes), l'ensemble bénéficiant d'une interprétation de qualité, entre Luc Merenda tout à fait crédible dans le rôle de Ted et la belle Senta Berger jouant Sara avec conviction.
La mise en scène du réalisateur est efficace pour délivrer quelques plages d'un suspense tendu en s'appropriant certains effets du "giallo", notamment lors des courts flash-backs troubles venant du passé de Ted, mais hélas l'ensemble manquera par moments de vigueur dans sa démonstration. Les quelques plans légèrement sanglants resteront basiques, même lors d'un final volontaire dans son idée principale mais peu graphique en soi.
Donc, ce "L'homme sans mémoire" pourra être considéré comme un "giallo" atypique mais certainement pas dénudé d'intérêt grâce à une intrigue recherchée et bien prenante jusqu'à son dernier acte remarquable !
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