Ce film de Jean-Luc Godard ("A bout de souffle", "Pierrot le fou") commence de façon originale, par un générique hommage au cinéma, non pas écrit, mais lu. S’en suit une scène culte, montrant Brigitte Bardot ("Et Dieu… créa la femme", "Viva María !") nue allongée sur un lit, parlant avec son mari, interprété par Michel Piccoli ("Max et les ferrailleurs", "La Belle Noiseuse"). Cette scène accompagnée d'une musique également très connue est étrangement pour de nombreuses personnes la seule vraiment connue du film, car autrement celui-ci semble être un peu oublié. Il fait parti des films que l'on croit connaître alors qu'il n'en est rien. Sur cette scène, le réalisateur joue constamment avec la lumière et les couleurs pour dépeindre un couple amoureux. Le film est adapté du roman de Alberto Moravia, mais est également fortement influencé par "Voyage en Italie" de Rossellini. Jean-Luc Godard nous dépeint ici la fin d'une histoire d'amour, sans nous en donner réellement les raisons. Camille s'aperçoit du jour au lendemain qu'elle n'aime plus son mari, sans pouvoir vraiment l'expliquer, certainement par lassitude, par épuisement dû à la routine du quotidien. Elle a envie simplement de nouvelles choses, de nouvelles émotions. Elle se tourne alors vers le producteur Jeremy Prokosch, interprété par Jack Palance ("Barabbas", "Le Mercenaire") avec qui travaille son mari, le scénariste Paul Javal. Mais en fait elle se tourne vers le premier venu, car cela aurait pu être n'importe qui et cette aventure que l'on devine sans lendemain, n'est qu'un prétexte pour vivre d'autres expériences. D'ailleurs, le producteur ne parle pas français et Camille ne parle pas anglais, il n'y a donc pas de réel communication entre eux et même les regards de Camille vers Prokosch n'évoquent rien. En revanche, les nombreux regards qu'elle porte à son mari, eux semblent dire "Retiens moi!" ou "Ne me laisse pas partir!"... Mais, Paul ne semble pas comprendre ou s'en aperçoit trop tard. Lorsque celui-ci s'en aperçoit vraiment, il part armé d'un revolver et l'on devine donc que le film se terminera de façon tragique. Mais pourtant Paul laissera partir Camille, cherchant toujours à savoir pour quelles raisons elle ne l'aime plus et la tragédie interviendra de façon inattendue et pouvant ici apparaître comme une punition divine. Il est évident lorsque l'on voit le film que Paul est en fait le cinéaste Jean-Luc Godard car il porte constamment le même chapeau que celui-ci et fume le cigare comme lui. Le réalisateur joue beaucoup sur les couleurs pendant tout le film avec souvent des couleurs chaudes sur fond blanc. Il joue aussi beaucoup sur l'architecture des lieux, notamment aux studios Cinecittà et dans l'appartement du couple à Rome, ainsi que dans la partie du film qui se passe à Capri, avec cette incroyable maison sur la côte en haut d'un rocher. Le film se passe dans le milieu du cinéma et Godard en profite pour faire tourner Fritz Lang ("Métropolis", "M le maudit") qui représente ici le passé, à l'inverse de Bardot qui représente la femme moderne. Il est à noter que le réalisateur français fait une apparition dans son film et joue ici l'assistant de Lang. Le son semble pris le plus souvent sur le vif, notamment sur les scènes d'intérieur, ce qui n'est pas toujours agréable à écouter. Godard filme BB avec beaucoup de respect et de pudeur malgré le fait qu'il la filme nue à plusieurs reprises (ce qui était voulu par la production) et étonnamment, elle apporte moins d'érotisme au film que la "sirène" jouée par Linda Veras. Malgré de nombreuses qualités, le film n'est pas dépourvu de défauts, il souffre par moments d'un manque de rythme et de répétitions.
"Le mépris" est un film bouleversant, qui avec le temps, est devenu un classique, connu de la plus part des gens, mais étonnamment, souvent que de nom ou à travers une scène, qui finalement n'est pas si importante que cela pour le film. Il mériterait pourtant d'être diffusé plus souvent afin de pouvoir toucher plus les jeunes générations.
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