Dès les premières images, on retrouve ce qu'il faut bien appeler le "style", tendu comme une corde de violon, de Friedkin : le regard cerné de noir de Benicio Del Toro et la vision d'horreur d'un village du Kosovo en plein massacre. Scène primale qui va décider du sort du personnage et qui va planer comme une mauvaise conscience sur tout le film. Tommy Lee Jones, instructeur qui n'a jamais tué mais qui a appris à tant de soldats à le faire va être tiré de sa retraite canadienne pour traquer le malade. A partir de ce postulat simple, Friedkin crée un film court, sans graisse, presque muet, qui s'attache au physique et au tactile et réussit en filigrane un troublant dessin psychologique aux implications morales. Nul manichéisme, mais nul prêche non plus. Rien qu'une traque, tantôt dans la nature hivernale, tantôt dans la jungle urbaine, tragique car on en devine l'issue inéluctable. La magnifique photo de Caleb Deschanel sert avec une sobre discrétion la mise en scène de Friedkin.
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