Western définitivement atypique préfigurant les "western soja" qui allaient suivre, ce "Mon nom est Shangaï Joe", réalisé par Mario Caiano (respectable artisan qui versa aussi bien dans l'horreur gopthique avec "Les amants d'outre-tombe" que dans la "nazisploitation" avec "Destin de femme") va se servir d'une violence qui n'hésitera pas à se montrer bien sanglante pour illustrer un thème certes simpliste mais qui ici sera traité de manière foncièrement éloquente avec ce personnage principal largement attachant et des rebondissements incessants qui mettront en avant toute une galerie de "sales gueules" terriblement graphiques et détestables, laissant alors le métrage devenir défaitiste quant au genre humain.
Le script va suivre l'arrivée au Texas d'un chinois qui va devoir faire face au racisme des autochtones avant de devenir la cible d'un trafiquant d'esclaves qu'il aura sévèrement contrarié.
D'entrée le métrage va avancer son personnage central, Shangaï Joe, s'apprêtant à quitter San Francisco pour le Texas, après avoir bien eu du mal à dégotter une place "dans" une diligence, puisqu'en effet les employés chargés de délivrer les billets l'ignoreront copieusement et il se retrouvera à devoir faire le trajet non pas en compagnie des autres passagers mais mal installé à l'arrière de la diligence à l'extérieur. Cette entame imposera déjà un des thèmes du film en avançant ce racisme primaire dont Joe sera victime, et cela ne va pas s'arranger par la suite.
En effet, à peine arrivé au Texas, il va se faire larguer dans un relais où il sera la cible des railleries xénophobes de trois lascars qui se moqueront ouvertement de lui avant de le provoquer directement pour au final recevoir une correction bien méritée et qui commencera à mettre en avant les dons de Joe en matière d'arts martiaux, ce qui sera prolongé pendant toute la première partie du métrage qui laissera Joe, cachant ses aptitudes derrière son allure presque simplette, être tourné en dérision par ceux qu'il va rencontrer pour à chaque fois s'imposer et clouer le bec de manière volontaire et spectaculaire, n'hésitant pas par exemple à se battre, quitte à casser un bras pour un premier écart sanglant.
Ses exploits vont rapidement venir aux oreilles de Spencer qui va dépêcher quatre hommes pour trouver Joe et lui proposer l'emploi de cow-boy désiré par le chinois, pour très vite le laisser découvrir que les hommes de Spencer se livre à un trafic d'esclaves au milieu des montagnes. L'arrivée d'une patrouille de soldats va compromettre le trafic et obliger les hommes de Spencer à se montrer délibérément sadiques et obligera Joe à se rebeller, devenant alors la cible de Spencer et de ses hommes, surtout qu'après avoir été une première fois pris au piège, il av réussir à s'échapper, sans oublier d'humilier Spencer. Dès lors, Spencer va mettre la tête de Joe à prix et toute une série de tueurs vont croiser son chemin pour une seconde partie toujours bien violente et extrêmement volontaire en présentant des personnages haut en couleurs.
Mario Caiano cherchera indéniablement à rendre son personnage central attachant et il y parviendra très rapidement à la vue du racisme stupide et puéril qu'il devra supporter de la part de la plupart de ses interlocuteurs, tandis que ce Joe fera preuve aussi bien de sang-froid que de sagesse dans ses propos et son but simple semblera largement louable, le tout teinté d'un misérabilisme dans la façon de mettre en scène le personnage qui va nous réserver bien des surprises pour se défaire des mauvais coups et épater ses adversaires, quand il ne les corrigera pas lors de bagarre empruntant évidemment au films de kung-fu pour des chorégraphie surprenante bien que parfois un peu datée dans leur mise en scène.
Alors bien entendu l'intrigue pourra parfois paraître un peu facile pour laisser Joe déjouer les pièges tendus et se défaire de ses agresseurs, mais cela ne sera pas du tout gênant et collera bien au personnage perspicace et rusé qui aura toujours une solution à ses problèmes et ce bien que n'utilisant jamais la moindre arme à feu, contrairement à ses opposants perfides, roublards et tricheurs. Et justement, tous ces truands et autres tueurs croisés par Joe donneront une ampleur supplémentaire au métrage en alignant des protagonistes détraqués (la palme revenant à celui joué par un Klaus Kinski une nouvelle fois énorme de folie), faisant preuve d'un sadisme typiquement latin comme ce Spencer dont la cruauté sera sans limite comme par exemple lorsqu'il s'amusera à tirer sur un pendu pour le plaisir ou tout simplement idiots et racistes qui ne pourront pas s'empêcher de vouloir se moquer de ce chinois à l'allure quelque peu nigaud, achevant ainsi d'entériner la noirceur et l'aspect tragique dont fera preuve le métrage envers l'état de l'espèce humaine.
Bien entendu, l'antagonisme entre Joe et ses adversaires jouera pleinement pour imposer au spectateur de prendre parti pour le chinois surtout qu'il sera verra adjoint la compagnie de la fille d'un des esclaves qu'il aura sauvé, lançant ainsi un début de bluette presque platonique à la vue du respect des traditions et des règles d'un Joe droit et ne pensant qu'à rendre la justice, suivant ainsi la ligne tracée par son passé qui nous sera expliqué lors d'un flash-back tardif et nécessaire pour amener le duel final hélas quelque peu précipité pour une issue laissant un petit arrière-goût d'inachevé, pour ne pas dire bâclé.
Le métrage aura également de quoi surprendre par son univers graphique pour ces bagarres virtuose mais surtout pour cette violence qui deviendra régulièrement sanglante, voire même gore comme lorsque Joe va énucléer un de ses ennemis en lui arrachant un œil, tandis que les impacts de balles feront jaillir le sang et que le final nous réservera une dernière surprise gore, le réalisateur n'hésitant par ailleurs à nous délivrer quelques gros plans sanglants graphiques étonnants.
L'interprétation est largement convaincante, portée par Chen Lee qui incarnera un Shangaï Joe crédible et attachant, tandis qu'en face de lui on retrouvera des habitués du western spaghetti, comme Klaus Kinski, mais aussi Gordon Mitchell, Claudio Undari ou encore Piero Lulli. La mise en scène de Mario Caiano est efficace pour donner du rythme aux scènes d'actions magnifiquement chorégraphiées tout en imposant un style avec des effets marquants comme l'usage du ralenti, pour ailleurs presque donner à certaines situations une atmosphère flirtant avec le fantastique. Les effets spéciaux sont globalement probants pour ces plans sanglants graphiques.
Donc, ce "Mon nom est Shangaï Joe" restera un western définitivement atypique par le traitement graphique et pessimiste de son sujet souvent surprenant et pour ces nombreux protagonistes hauts en couleurs !
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