Contrairement à ce que l’on pourrait croire ce "Shuttle" ne va pas s’engouffrer dans la vague de "Torture flicks" sévissant en ce moment sur les écrans pour au contraire imposer un huit-clos prenant qui laissera judicieusement planer une incertitude quant aux motivations de chacun, pour certes se révéler parfois prévisible et distiller certains rebondissements légèrement faciles, mais tout en captivant son spectateur sur la durée jusqu'au final sans rémission et sans issue.
Le script va laisser cinq personnes prendre place à bord d'une navette à la sortie d'un aéroport sans se douter que le chauffeur va les séquestrer dans un but bien précis.
Le métrage va commencer de manière très classique pour nous présenter ses deux personnages principaux, Mélanie et Jules, deux demoiselles de retour d'un week-end aux Caraïbes et débarquant de leur avion, avançant ainsi deux bimbos classiques avec une Mélanie malade et qui paraîtra très rapidement plus intelligente et perspicace que son amie Jules, uniquement attirée par un garçon venu la draguer, Seth, lui aussi accompagné par un ami, Matt.
A la sortie de l'aéroport, les deux jeunes femmes vont décider de monter dans une navette pour rentrer en ville, bientôt rejointes par Matt et Seth, et alors que seul un autre passager présent sur place. La présentation des protagonistes va alors se poursuivre quelque peu, laissant encore plus clairement Matt et Mélanie apparaître comme ayant la tête sur les épaules au travers de conversations adultes que les deux autres, jusqu'à ce qu'ils se rendent compte que le chauffeur n'aura pas pris la direction du centre-ville pour se hasarder dans une zone industrielle déserte, chose qu'il expliquera par une raison assez fumeuse.
Le premier incident arrivera lorsque la navette va se retrouver avec un pneu crevé suite à une rencontre avec une voiture folle (placée là par hasard ?) et que Matt, en aidant le chauffeur à changer le pneu hors d'usage, va se faire sectionner quatre doigts lorsque le cric va glisser. La situation ne va pas tarder à déraper, les passagers s'en prenant au chauffeur qui ne semblera pas connaître le chemin de l'hôpital le plus proche et celui-ci va montrer son vrai visage en sortant un revolver pour menacer ses cinq passagers, et surtout les quatre jeunes puisque le cinquième, un comptable timide et peureux au possible, ne représentera pas vraiment une menace pour lui.
Mais au lieu d'emprunter un chemin connu dans le genre pour laisser ce chauffeur devenir un bourreau gore, l'intrigue va préférer avec justesse rester dans la navette pour avancer des rebondissements très régulièrement qui mettront en avant une combativité réelle et crédible des passagers, surtout que le chauffeur va leur faire accomplir différentes actions qui sembleront s'inscrire dans un but bien précis mais ignoré de tous, y compris du spectateur.
Ces activités assez étranges (dont des courses dans un supermarché ouvert la nuit ou encore retire de l'argent dans un distributeur) vont venir à l'encontre de l'idée simple que le chauffeur n'en veut qu'à l'argent de ses passagers et vont à chaque fois permettre aux personnages de tenter quelque chose pour s'échapper, laissant le spectateur (acquis à la cause de ces jeunes plutôt attachants et surtout guère stéréotypés malgré les apparences trompeuses de l'introduction) trembler pour eux et espérer qu'ils arrivent à fausser compagnie à ce chauffeur qui saura se montrer bien cruel pour intimider ses victimes.
Le métrage nous réservera à mi-parcours une première surprise hélas quand même anticipable et qui ne fera que renforcer la précarité de la situation des passagers pour encore proposer des issues possibles qui vont évidemment se solder par des échecs tragiques et parfois féroce, alors que la métrage se servira de sa violence à des fins narratives, tout en n'hésitant pas quand même à se montrer graphique et même brutal lorsqu'il le faudra, mais sans pour autant verser dans un gore qui se fera très discret.
La seconde partie du film commencera à apporter des éléments de réponse pour peu à peu laisser deviner les intentions de ce chauffeur qui sera par ailleurs assez ambigu car derrière sa détermination et sa brutalité se cachera un semblant d'humanité parfois visible, l'intrigue nous donnant alors des indices assez flagrants (et en partie donnés de manière idiote et précoce par l'affiche américaine du film, heureusement écartée pour cette édition française) tout en continuant à offrir aux survivants des possibilités d'échappatoire qui seront plus ou moins exploitées jusqu'au final sombre et défaitiste qui éclairera complètement le spectateur tout en lui laissant un goût amer dans la bouche avec la crédibilité évidente du motif de l'enlèvement des passagers et un mobile pour le chauffeur en totale adéquation.
Les personnages seront donc assez bien travaillés pour se sortir des stéréotypes classiques du genre et agir de manière plus adulte et responsable, avec même des réactions naturelles et des dialogues légitimes, le tout étant épaulé par une interprétation convaincante, avec notamment un Tony Curran impeccable dan le rôle du chauffeur tandis que les mignonnes Peyton List et Cameron Goodman camperont les deux personnages centraux avec justesse. La mise en scène du réalisateur est efficace pour garder un rythme global alerte et vif tout en ménageant avec réussite ses effets de surprise et en donnant du relief aux éclats de violence qui parsèmeront le métrage, et alors que la photographie blafarde renforcera la tension omniprésente liée à l'insécurité de la situation des protagonistes. Les effets spéciaux sont probants pour les quelques plans sanglants du film.
Donc, ce "Shuttle" constituera une bonne surprise dans le paysage du direct to DVD trop souvent formaté et guère original pour s'imposer comme l'une des petites réussites en la matière de ce début d'année avec son intrigue cohérente et défiant les situations imposées et les stéréotypes !
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