The Grifters, titre original du roman comme du film, révèle l'univers des petits arnaqueurs. Par rapport à hustler, l'arnaqueur-escroc, grifter désigne l'arnaqueur de moindre envergure, le gagne-petit de l'entourloupe. La fréquence de ses prestations le contraint, par voie de conséquence, à une grande mobilité. Il sillonne le pays pour ne pas être reconnu, apparaît dans chaque ville comme une figure anonyme. Ce faisant, il ne peut avoir d'attaches, d'existence. Son errance est négative. Telle est précisément la destinée de Roy, habile petit escroc velléitaire, dont la brève existence ne lui laissera pas le temps de choisir entre l'immobilité et le mouvement, entre sa dépendance névrotique à l'égard de sa mère et son épanouissement personnel. Le caractère imprévisible du comportement des personnages, observés dans des agissements qui rappellent ceux des animaux prédateurs, devait intéresser le réalisateur, Stephen Frears, qui déclarait aimer les romans noirs pour la complexité et le mystère de leurs personnages. Après la vision des Arnaqueurs, on reste marqué par une séquence d'anthologie: la correction infligée à Lilly par son patron bookmaker, structurée comme une rencontre débonnaire et distillant progressivement la terreur la plus panique autour de quelque oranges mystérieuses et menaçantes.
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