"Grotesque", "A Serbian Film", maintenant "The Bunny game" et prochainement "Subconscious Cruelty"... Mine de rien Elephant films est en train de devenir en France, l'éditeur de l'extrême, nous livrant qui plus est des éditions très soignées de ces films et surtout en version non-censurées. Avec "The Bunny Game", on a affaire à un film moins violent physiquement que les autres, mais tout aussi violent psychologiquement. Une expérience qui, en tous cas, ne peut laisser indifférent!
Pour bien appréhender ce film de Adam Rehmeier ("Jonas"), il aurait été à mon avis souhaitable de le précéder d'une présentation, car la connaissance de certains facteurs change pas mal la vision de celui-ci. En effet, il est important de savoir que la jeune Rodleen Getsic ("Charlotta-TS"), qui va être ici séquestrée et va subir violence et humiliations, est également productrice et scénariste du film et que pour se mettre en condition, elle n'a rien mangé durant 40 jours avant le tournage et que durant celui-ci, elle n'hésitera pas à se faire violenter et marquer au fer rouge réellement. Vu ainsi, l'impact est encore plus marquant, mais lorsqu'on sait que la jeune femme a dans le passé était également kidnappée, cela en devient réellement perturbant! Dès les premières images, le réalisateur choque en montrant l'enfer que vit la jeune femme au quotidien, errant la plus part du temps dans la rue, passant sa vie entre passes avec des clients souvent violents envers elle et shoots à la cocaïne. Il n'hésitera d'ailleurs pas à nous montrer dès la première scène une fellation non simulée où le client manque à plusieurs reprises de l'étouffer en lui tirant la tête violemment vers lui pendant de longues secondes. Une scène éprouvante qui immédiatement donnera le ton du film, même si cela sera la seule scène réellement à caractère pornographique. La vie de la jeune femme est donc bien sordide, mais ce n'est rien encore, car comme souvent lorsqu'on se prostitue, on fait régulièrement de mauvaises rencontres... Pour son malheur, sa route va croiser celle de Hog, un camionneur, interprété par Jeff Renfro ("A Lure: Teen Fight Club"), qui va l'enlever, puis la séquestrer en plein désert, dans la remorque de son camion. L'acteur est vraiment bluffant et totalement crédible, mais il faut dire que l'homme est réellement camionneur, car même s'il travaille depuis longtemps dans le cinéma, c'est en tant que transporteur. Ce qui va très rapidement surprendre chez cet homme, ce sont ses motivations plutôt étranges. Celui-ci va en effet se livrer dans un premier temps à un bien curieux rituel, essayant de réveiller sa victime, tout en la déshabillant petit à petit, méthodiquement, en la touchant certes, mais pas plus que ça. D'ailleurs une fois réveillée, il ne va pas essayer de la violer comme on aurait pu l'imaginer et cela même si on sent tout de même un côté très malsain chez lui. Il va tout d'abord jouer avec la jeune femme inanimée comme avec un pantin désarticulé, puis une fois réveillée, la traumatiser en l'enchaînant sans qu'elle sache ce qu'il veut d'elle, sans lui donner à boire, puis en l'humiliant tout d'abord en lui rasant le crâne, puis en la baladant dans le désert avec une laisse, avant de se livrer à un bien étrange jeu, le Bunny Game... La violence sera donc essentiellement psychologique, même si elle sera aussi physique par les étouffements notamment, quelques claques ou encore en la forçant à boire. La torture consistera également à lui laisser de l'espoir, un espoir évidemment de très courte durée, la poussant à la limite de la folie, pour finir en la confier à un complice, un certain Jonas, qui sera d'ailleurs le héros du film suivant du cinéaste, nous laissant alors dans l'expectative devant une fin sans réponse, où au final on se demande vraiment quelles étaient réellement les motivations du tortionnaire. On en vient par moments à se demander si par l'enlèvement, son but n'est pas à la fois de la punir pour sa vie qu'il considère comme une vie de débauche et en même temps de la sortir de cet enfer. Le film est servi par une très belle photographie noir et blanc, avec par moments des morceaux de Death metal accentuant pas mal le malaise que l'on peut éprouver. Il est difficile de savoir autrement trop quoi penser du film, car il n'est pas fait pour être apprécié, mais plutôt pour déranger le spectateur confortablement installé dans son fauteuil... Pour leur premier film, Adam Rehmeier et Rodleen Getsic, marquent de suite les esprits et créent forcément la polémique. Ce film est né de leur collaboration et le réalisateur a fait savoir qu'il ne pensait pas refaire de films dans le même style, même si "Jonas", son film suivant reprend en effet le personnage qui apparaît à la fin de celui-ci. En fait, l'histoire se passe des années plus tard dans un contexte très différent...
"The Bunny Game" est un film très éloigné des torture-porn que l'on a l'habitude de voir ces dernières années, il nous rappelle d'ailleurs quelque peu par son réalisme, son thème et son noir et blanc, "PIG", le court métrage très dérangeant de Nico B. et Rozz Williams. Pour public averti bien évidemment!
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