"Allons z'enfants" n'est pas forcément le film le plus connu d'Yves Boisset ("Coplan sauve sa peau", "Le Juge Fayard dit le shériff", "Le prix du danger", "Canicule"), mais c'est pourtant son film préféré et celui dont il dit que c'est son plus personnel.
Cette adaptation d’un roman d'Yves Gibeau est un film profondément antimilitariste tout comme l'est le réalisateur. Le film fût réalisé en 1980, mais non sans difficulté, notamment à cause des institutions militaires de l'époque, qui feront tout pour que le metteur en scène ne puisse pas tourner son film, l'empêchant par exemple de tourner dans des casernes même désaffectées ou même dans d'anciennes réhabilitées, mais également en lui bloquant l'accès au matériel militaire se trouvant dans les surplus, faisant pour cela pression sur les commerçants qui en vendaient... Mais bien décidé à faire tout de même son film, Yves Boisset se débrouilla pour obtenir le matériel nécessaire grâce notamment à des collectionneurs privés et réussira à tourner dans d'anciennes casernes tout juste cédées à la ville de Chambéry grâce à la complicité du maire de l'époque. "Allons z'enfants", c’est l’histoire de Simon Chalumot, magnifiquement interprété par Lucas Belvaux ("La Femme publique", "Poulet au vinaigre", "Joyeux Noël") dont c’était ici le premier rôle au cinéma, un jeune garçon antimilitariste, forcé par son père, un ancien adjudant joué par Jean Carmet ("Dupont Lajoie", "René la Canne", "Buffet froid", "Canicule"), de rentrer dans les enfants de troupe. Cette institution militaire, auquel il va violemment s’opposer, va alors tout faire pour qu'il plie, le poussant même au suicide... Yves Boisset signe ici un film dur et poignant, mais jamais larmoyant. Au contraire, le film révolte, scandalise devant un tel acharnement, d’autant plus que le jeune Chalumot n’est pas un pleutre, mais un garçon courageux qui va au bout de ses convictions. D’ailleurs, après le refus systématique, Chalumot démontrera à sa hiérarchie qu’il peut aussi bien faire, être un bon élève, afin de démontrer que ce n’est pas par lâcheté qu’il ne veut pas tenir une arme. Et puis, c’est un jeune homme attachant, passionné de littérature et de cinéma, voulant devenir metteur en scène plus tard, un jeune homme pour lequel on va forcément éprouver de l’empathie. Il faut dire que même si on n’a pas les mêmes convictions, il sera dans tous les cas difficile d’approuver les méthodes de son père ou de certains de ses supérieurs comme le sergent Billotet , joué par un Jean-François Stévenin ("Notre histoire", "36 Fillette", "Le Pacte des loups", "La Chambre des morts") dont les sanctions sont absolument scandaleuses (Il ira même jusqu’à lui foutre une dérouillée à l’abri des regards !) ou encore le Capitaine Maryla, joué par un Jean-Claude Dreyfus ("Le Prix du danger", "Rue barbare", "Delicatessen", "Deux Frères"), assez génial dans son interprétation. C’est un film qui marque et qu’on n’oublie pas, notamment pour sa fin, qui nous achève lorsque les convictions du jeune homme sont une fois de plus bafouées et cela jusque dans sa tombe...
"Allons z'enfants" est un film véritablement bouleversant et donc un film à redécouvrir impérativement!
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