Une étoile filante traverse un ciel nocturne et ouvre le film, en un prélude allusif mais annonciateur du cauchemar à venir.
Dans une jungle d’Amérique du sud un commando dirigé par le major Dutch Schaeffer (Arnold Schwarzenegger) s’apprête à attaquer un groupe de guérilleros qui détient un ministre et d’autres otages.
Ce scénario fait forcément penser à Rambo 2. Mais le film ne tarde pas prendre un tour insolite, original et se transforme en film d’action fantastique. Car dans cette épaisse forêt se produisent des événements inattendus qui échappent à toute explication rationnelle.
La forêt joue ici le rôle du vaisseau spatial de « Alien » : environnante, infranchissable, surplombante, oppressante, menaçante, elle fait naître, en une remarquable gradation, des sentiments que les personnages finissent par ne plus contrôler : surprise, puis inquiétude, peur et panique face à l’innommable, enfin. Dans ce huis clos étouffant de la forêt qui emprisonne, la menace permanente vient de nulle part et de partout à la fois. Surtout, cet « ennemi », barbare et sanguinaire dans ses attaques, reste invisible et les quelques traces qu’il laisse ne sont humainement pas identifiables. Pire, il semble même se jouer de ses victimes.
Dès lors, s’engage une lutte à mort entre les rescapés et leur assaillant invisible, qui débouche sur l’un des plus étonnants combats du cinéma.
John Mac Tiernan signe là un film de genre rare : avec une maîtrise implacable, il ne cesse de nous surprendre pendant plus de cent minutes avec la plus simple des situations : un huis clos, quelques personnages et un ennemi inconnu constituent le point de départ d’un suspens, constamment renouvelé, s’achevant en apothéose au cours des dernières vingt minutes, qui nous font passer du spectacle d’un combat barbare à l’antique à une chute de récit qui réintroduit, sarcastiquement, le plus moderne des fléaux de l’époque.
La fin, tout à fait inattendue, révèle tout l’humour du réalisateur – et son détachement par rapport au genre (cf. son commentaire audio) – dans son réemploi de la musique de Randy Newman (composée pour célébrer « Le Meilleur » de Levinson) pour saluer, de la plus ironique des façons, le vainqueur qui se croyait, lui aussi, « le meilleur ».
Un excellent film d’action fantastique à conseiller pour son pouvoir de fascination intact plus de seize ans plus tard.
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