Ceux qui ont aimé « Les Tontons flingueurs » et « Les Barbouzes » vont apprécier « Ne nous fâchons pas » (1966) du même Georges Lautner, dialogué par Audiard. A la différence des deux précédents, celui-ci est en couleurs et, donc, pour certains, apparaîtra plus attrayant.
Il met en scène, en un savoureux pastiche des films à la James Bond, un couple détonant , Michalon (Jean Lefebvre) et Antoine Beretto (Lino Ventura). Et le premier intérêt du film est, précisément, d’opposer deux « caractères » à la fois antagonistes et complémentaires : autant Lefebvre/Michalon se comporte en véritable tête à claques (mou, indécis mais entêté et rétif), autant Ventura/Beretto (tout en force, impulsif, irascible, soupe au lait) distribue volontiers les baffes comme on respire. Bref, l’un ne va pas sans l’autre et le film est en grande partie construit sur le lien particulier qui unit, pour le meilleur et souvent le pire, ces deux personnages. Mais d’autres acteurs participent à cette délirante fête du rire : un Michel Constantin impavide, le sourcil toujours interrogateur, et si grave dans les situations comiques qu’il en finit par devenir irrésistible. Mireille Darc (une Mme Michalon passablement remontée contre son ectoplasme de mari), enfin, apporte dans ce » monde de brutes » toute sa drôlerie, son charme et sa sensualité, en pastichant les vamps. On ne peut pas ne pas évoquer la scène où Ventura fait comprendre à Jean Constantin qu’il l’a séduite, et qui est l’un des meilleurs moments du film ! Ajoutons que les dialogues sont signés par Michel Audiard et proposent leurs lots habituels de répliques réjouissantes et contribuent au charme du film. Les amateurs apprécieront.
Le film est, d’autre part, une parodie des films d’action à la James Bond et de la mode anglaise qui déferlait alors (1965) sur la France avec la « Beatlemania » : le terrible colonel MacLean est donc flanqué de jeunes tueurs coiffés et habillés comme les Beatles et se déplaçant… à mobylette (parodie oblige !). La musique met bien évidemment l’accent sur le rock et le jerk de l’époque. Cette invasion anglaise débouche, dans le film, sur une opposition entre les clans Beretto et MacLean : elle commence par de simples escarmouches, se poursuit par de véritables batailles rangées et s’achève, en apothéose, par une guerre totale – mais toujours désopilante - sur fond d’explosions et de destructions des quartiers généraux respectifs.
Humour parodique et second degré, claques récurrentes et explosions dévastatrices, dialogues percutants et acteurs épatants, le cocktail est détonant et se consomme sans modération.
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