Cette réalisation de David Mamet (« Engrenages », 1987 ; « La Prisonnière espagnole », 1997) propose, dans le genre film d’action, une intrigue séduisante, des dialogues savoureux et des acteurs très convaincants.
Un scénario ingénieux nous conduit de surprises – nombreuses – en retournements – multiples – de situation. Le mot-titre est au pluriel car c‘est à deux braquages que l’on assiste. Mais le scénario de Mamet est innovant. En effet, si le premier se déroule en ouverture du film selon un enchaînement rapide des faits entièrement (et remarquablement) basé sur l’apparition successive des différents protagonistes à l’écran, et si nous assistons ensuite aux conséquences inattendues de ce casse qui préludent, directement, au second braquage, il faudra attendre la seconde partie du film pour qu’il se déroule selon un scénario de nouveau inattendu. Entre les deux braquages, l’intérêt ne retombe jamais grâce à une série d’anecdotes et à des rapports entre personnages insolites. Les rouages de l’intrigue sont donc parfaitement huilés pour mieux jouer avec le spectateur. On signalera toutefois, comme il est d’usage dans ce genre de réalisation, deux ou trois invraisemblances…
L’autre point fort du film est assurément le souci apporté à des dialogues toujours brillants faits de réparties vives et savoureuses (par exemple - je cite de mémoire : « Mon copain est si décontracté que ce sont les moutons qui comptent pour l’endormir »).
Les acteurs, enfin, (Gene Hackman, Danny De Vito, Deroy Linto) sont parfaits dans leurs rôles respectifs : humains, solidaires et attachants pour les uns ; cyniques et violents pour les autres. On fera, toutefois, une réserve pour Rebecca Pidgeon (Fran), excellente pendant les deux tiers du film, mais moins convaincante sur la fin (son rôle difficile en est sans doute la raison).
Le film dépeint un univers réglé par les tromperies, les escroqueries et l’appât du gain, et placé sous le signe d’un cynisme ouvertement affiché, mais dénoncé : en effet, le personnage le plus sympathique en est aussi la première victime et son exécution n’est connu qu’indirectement par le spectateur, en une scène très pudique ; d’autre part, l’innocence symbolisée dans le film par la présence d’une petite fille (la scène est merveilleuse de tendresse !) n’est qu’une parenthèse vite refermée, même si elle sert à faire réfléchir sur le cruel contraste entre l’univers plein de promesses de l’enfance, et le monde adulte méfiant, corrompu et nihiliste : cette fillette deviendra-t-elle semblable à Fran, la jeune femme du film ? Ou encore, Fran a-t-elle été un jour cette enfant-là ?
En définitive, ce film d’action est une comédie qui mélange les tons – d’une ironie caustique à une discrète émotion – et constitue un divertissement agréable.
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