« Bienvenue à Collinwood » de Joe et Anthony Russo est inspiré du film de Monicelli, « Le Pigeon » (1958), qui lança la comédie italienne grinçante et révéla, dans l’Italie des années soixante, une nouvelle génération d’acteurs (Claudia Cardinale, Marcello Mastroïani, Vittorio Gassmann, entre autres). Le titre français manie l’ironie car Collinwood est un quartier défavorisé peuplé d’habitants pauvres, de marginaux et de délinquants. On voit bien pour quelle raison les producteurs George Clooney et Steven Soderbergh ont eu l’idée de cette nouvelle version : retrouver la subtile alliance du film italien entre le point de vue social et l’aspect comique. L’enjeu est-il pour autant tenu ?
Certes, les réalisateurs évoquent les difficultés sociales de leurs personnages : Riley (William H. Macy) doit s’occuper seul de son enfant puisque sa femme est en prison ; certes, Pero (Sam Rockwell) est un boxeur dont les ambitions ne se réalisent pas et qui doit vivre d’expédients ; certes, Toto (clin d’œil à l’acteur homonyme italien) est un vieillard sans ressource. Mais ce réalisme social (chômage, misère, débrouille, vieillesse) n’est qu’esquissé et cède trop rapidement la place à une comédie qui orchestre la dérision : on y voit par exemple un George Clooney faire un beau numéro d’handicapé dirigeant, depuis son fauteuil roulant, l’ »attaque » d’un coffre-fort.
Mis sur une affaire qui peut leur rapporter gros, les protagonistes – incapables de garder le moindre secret, ils ne cessent d’agrandir le nombre des complices diminuant ainsi leur part virtuelle sans s'en rendre compte – ont le don d’embrouiller les pistes et de compliquer les situations les plus simples. Il faut ajouter en leur défaveur, outre leur maladresse congénitale, une malchance qu’ils ont le don d’attirer à tout moment. On aurait envie de citer cette autre comédie italienne "Affreux, sales et méchants" pour les désigner! Et il est vrai que le comique fonctionne assez bien dans certaines scènes désopilantes – avec cette réserve que l’on sourit plus qu’on ne rie vraiment.
Le final donne au film une dimension humaine plutôt surprenante dans la mesure où les réalisateurs s’attachaient surtout jusque-là à mettre l’accent sur la comédie. Ce changement, bien trop tardif, nous laisse pourtant entrevoir ce que le film aurait pu donner s’il avait davantage pris en compte l’épaisseur des personnages à travers un meilleur dosage de son double aspect social et comique.
Pourtant, tel qu’il est réalisé et grâce aux talents de ses acteurs confirmés, ce film sympathique, cocasse et ironique, fait souvent sourire. A défaut d’être franchement réussi.
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