Après l'échec commercial de son film précédent (la route de Salina), Georges Lautner décide de revenir à ses premières amours, la comédie à la française. Son parti pris artistique est cependant différent de ses films précédents tels les Tontons ou les Barbouzes car au départ l'histoire qui, basiquement se résume à une vengeance d'un gars qui sort de taule à l'égard de sa femme, aurait pu être traitée comme un polar noir. Lautner prend une autre direction et décide d'utiliser tous les éléments dramatiques de son scénario pour les passer à la moulinette de la machine à rire.
A partir de là, tout est prétexte à la dérision, à la parodie de film de gangsters, à des gags limite "cartoonesque" : les cadavres s'accumulent autour des trois personnages principaux (avec des façons de mourir parfois d'une absurdité tellement décalée qu'elles en deviennent génialement comiques) tandis que le scénario progresse de façon simple et constructive. Ce que l'on retiendra également de ce film c'est que Georges Lautner est un réalisateur qui a su parfaitement caler ses films à leur époque de tournage : il y a dans Laisse aller c'est une valse une indéniable touche 70's tant dans les dialogues que dans les décors ou même dans la représentation des scènes comiques (qui sont parfois limite Monty Python); l'humour des répliques à la Audiard n'est plus de mise ; le discours se fait plus moderne (l'adaptation est co-signée avec Bertrand Blier futur réalisateur des Valseuses 4 ans plus tard) avec en arrière plan une certaine libéralisation des moeurs (Mai 68 était passé par là).
Il n'empêche, sans être l'un des plus achevés de Lautner, ce film se laisse toujours regarder avec plaisir, servi qu'il est par un casting de comédiens exceptionnel : des plus petits rôles aux plus présents on trouve ce qui se faisait certainement de mieux à l'époque : outre Jean Yanne qui, on peut le dire fait déjà du Jean Yanne dans sa façon de jouer (ce phrasé avec parfois cette mine de coker pessimiste et désabusé), on trouve la "Grande Duduche" (oui Georges, on a compris que la Mireille c'était ton idéal féminin...!) égale à elle-même avec ce minois tantôt boudeur, tantôt désarmant, et le grand je dis bien, le grand Michel Constantin : éternel second rôle du cinéma français (Lautner saura lui rendre hommage dans son film Il était une fois un flic), ce comédien a non seulement une dimension comique par son physique (comme dit Lautner, "Demandez à Michel de prendre l'expression d'un gars qui réfléchit et déjà vous êtes pliés de rire") mais aussi une réelle présence à l'écran porté qu'il est par des répliques toujours cinglantes et qui s'imposent au reste des personnages. Rajoutons également M. Bernard Blier (toujours parfait et à l'aise dans ce type de film) et les éternels porte-flingues que sont Venantino Venantini et Jess Hahn, sans oublier d'autres comédiens débutants comme Jean-Michel Ribes, Daniel Prévost, Philippe Khorsand, ou même Rufus et sa fameuse réplique du "How much wood would a woodchuck chuck if a woodchuck could chuck wood...!"
Bref, un film sans prétention dédié au divertissement du spectateur et qui selon moi, n'a pas pris beaucoup de rides. A noter comme dans la plupart des films de Lautner une excellente BO.
|