Ce "Evilenko" vient nous conter l'histoire du plus emblématique des tueurs en série de l'ex URSS et des pays de l'Est en général, Tchikatilo, sans que l'on sache vraiment où s'arrête la réalité pour laisser place à la fiction. En effet, le script suit le parcours du personnage d'Evilenko, un parfait communiste en apparence, mais qui se révélera être un impitoyable schizophrène, pédophile, assassin d'enfants et de jeunes femmes et pour couronner le tout cannibale, tout en mettant en filigrane l'enquête d'un attaché du ministère de la justice traquant sans relâche le meurtrier dans l'obscurantisme soviétique. Et si le métrage repose essentiellement sur la formidable prestation de Malcolm McDowell qui, d'emblée, impose devant la caméra son charisme au service de ce personnage froid, pervers, dans une scène nous le faisant haïr d'office à cause de ses tendances pédophiles exposées sans complaisance, l'intrigue s'efforcera plutôt, tout au long du film, de cerner la psychologie trouble de cet être pour qui le déclin du communisme stalinien ne peut devenir une réalité, entraînant ainsi le spectateur dans les méandres de cette folie glauque et totale, mais sans jamais céder à une débauche d'effusions sanglantes, qui auraient bien entendu nuit à l'aspect sérieux et grave revêtu par le métrage, les rares séquences-chocs venant juste appuyer avec parcimonie l'horreur des situations. Mais, malgré une certaine familiarisation avec les méfaits de l'assassin, l'auteur ne fera jamais rien pour chercher à le rendre humain, nous le présentant comme un monstre de bout en bout, malgré une distanciation visible vis à vis des séquences montrées, jusqu'à l'énumération finale de tous ses crimes ( avec une absence définitive de remords ), tout en laissant une partie de ses mobiles flous, malgré l'évidente mise en parallèle avec la chute de l'empire communiste. On pourra aussi regretter la sous-exploitation de certains seconds rôles, notamment le femme d'Evilenko et surtout celle du psychanalyste aux tendances peu avouables, protagoniste qui ne fera qu'une trop brève apparition avant de succomber. Par contre, le réalisateur emploie à merveille ses effets, comme dans la scène de groupe dans "l'aquarium" où malgré la présence de nombreux individus, toute notre attention se concentre sur le meurtrier et son attitude détachée. Et c'est presque avec soulagement que l'on assiste au final, hélas ambigu sur le pouvoir d'hypnose d'Evilenko, mais plus certainement encore sur les motivations de ceux qui l'ont arrêté et leurs problèmes de procédure. Si l'interprétation est en grande partie sur la performance de Malcolm Mc dowell, les autres intervenants ne déméritent pas un instant et arrivent sans mal à être crédibles. La mise en scène du réalisateur est harmonieuse, jonglant de belle manière avec les différents plans, tout en étant largement aidée par une photographie presque terne d'où ressort parfaitement l'absence de luminosité. Les décors sont quant à eux parfaitement maîtrisés et reconstituent de façon très probante la vie sous l'empire soviétique. Donc, ce "Evilenko" nous dresse un portrait qui fait froid dans le dos de ce tueur calculateur et pervers, très symbolique d'un système moribond, mais dont le réalisateur ne fait pas forcément toute la dénonciation nécessaire !
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